Le contenu de cette fiche a été développé par le Centre d’écologie urbaine de Montréal (CEUM), dont la mission est de contribuer à la création de villes écologiques, démocratiques et en santé en impliquant activement les citoyens dans la transformation de leur milieu de vie.

S’intéresser aux familles, c’est porter une attention soutenue à une grande diversité d’usagers, notamment des profils plus vulnérables ou oubliés dans les processus de planification traditionnels : jeunes enfants, aînés, femmes enceintes, adolescents, etc. Cette approche est particulièrement pertinente, car elle permet à la fois de répondre à une variété de besoins, de comprendre des réalités qui sont amenées à évoluer dans le temps et de proposer des espaces adaptés aux nécessités plurielles des groupes hétérogènes que constituent souvent les familles.

Une municipalité attentive aux besoins des familles peut ainsi créer et aménager de meilleurs milieux de vie pour tous. Il s’agit d’une approche inclusive, basée sur les principes de l’accessibilité universelle. Prendre en compte les besoins des plus fragiles, c’est opter pour des solutions qui serviront à plusieurs au cours de leur existence.

Par exemple, installer une rampe pour les poussettes à l’entrée d’un parc facilitera aussi l’accès des personnes à mobilité réduite, des résidents du quartier traînant un chariot d’épicerie ou des enfants montés sur leurs draisiennes.

Si le regard informé et technique des experts est nécessaire pour élaborer un projet d’aménagement, il ne remplacera jamais les connaissances sensibles des citoyens qui habitent le milieu. Il est donc important de combiner ces apports complémentaires et de mettre à profit la richesse des savoirs expérientiels de ceux et celles qui fréquentent régulièrement les espaces au quotidien et les considèrent comme des milieux de vie.

Identifier les usages, mais aussi les désirs et les besoins des résidents permet de créer et d’aménager des parcs et des espaces verts qui répondront le mieux possible à ceux-ci, dans le contexte de leurs réelles conditions de vie.

Certaines bonnes pratiques garantissent le meilleur processus participatif possible :

  • Mobiliser une grande variété d’acteurs pour prendre en compte la diversité des usagers et des besoins
  • Favoriser le dialogue et l’écoute entre les participants afin de s’assurer d’une la compréhension mutuelle des enjeux
  • Adapter le format des ateliers ou des séances de consultation aux objectifs, aux publics et aux étapes de la démarche

Pour plus de détails, voir la fiche La participation citoyenne et l’outil pratique Les méthodes de consultation pour le réaménagement des parcs et des espaces verts.

Des outils, un format et un discours adaptés à chaque groupe

Comme dans tout processus participatif, il est nécessaire de bien connaître les objectifs de la démarche : vise-t-elle à enrichir le portrait-diagnostic du quartier? À préciser les usages réels du site à aménager ou à réaménager? À obtenir des suggestions d’équipements ou de services?

Pour atteindre les objectifs et répondre aux besoins réels des ceux qui vivent et animent le quartier au quotidien, il est important de connaître les besoins des familles. Par exemple, comment les jeunes enfants s’approprient-ils les lieux où ils jouent et se déplacent? Quelles sont les attentes des adolescents? Quel type de mobilier serait adapté aux mères allaitantes? En réfléchissant collectivement aux besoins des familles, on élargit la réflexion, ce qui permettra d’atteindre les objectifs plus facilement.

Pour impliquer étroitement les publics concernés dans la consultation et ainsi bénéficier de leurs savoirs sensibles d’usagers des lieux et de destinataires du projet, il est indispensable d’adapter le discours, les outils et le format des ateliers participatifs à chaque groupe d’âge. Les enfants n’ont pas la même capacité de concentration que des adultes, les parents qui travaillent sont moins disponibles durant la journée que les aînés, une approche interactive avec des exercices courts et concrets captivera davantage les adolescents qu’un long processus collaboratif, etc.

La prise en compte des paramètres suivants aidera à adapter les ateliers participatifs aux publics cibles :

  • Intérêts particuliers pour le projet
  • Disponibilité selon le moment de la journée
  • Niveau de familiarité avec le format (virtuel, sur le terrain, dessin sur une carte, etc.)
  • Capacité d’abstraction (manipuler des concepts)
  • Capacité de concentration dans la durée

Valeur ajoutée d’une approche axée sur les enfants

S’intéresser aux besoins, mais aussi à la manière de voir le monde des enfants ne peut qu’enrichir le processus de consultation. La prise en compte de leurs idées permet en effet de :

  • Concevoir des espaces verts et des parcs réellement adaptés à leurs besoins. En considérant
    leurs multiples façons de s’approprier l’espace public et en les laissant exprimer eux-mêmes
    leurs attentes, on développe une meilleure compréhension de leurs réalités.
  • Découvrir une autre perspective sur la ville. La petite taille des enfants, leur curiosité,
    leur rapport ludique à l’environnement urbain, mais aussi leurs usages fréquents des voies
    publiques en marchant, en courant, en pédalant ou en filant sur une trottinette leur font poser
    un autre regard sur la ville que celui des adultes.
  • Générer des idées créatives et innovantes. Moins contraints par des principes de réalité rigides,
    plus imaginatifs, les enfants peuvent trouver des solutions originales dont on peut s’inspirer.
  • Élargir le public à rejoindre. Par rebond, impliquer les enfants permet d’atteindre les parents et
    le reste de la communauté, même si ce sont traditionnellement des personnes plus éloignées
    des processus participatifs.
  • Impliquer les citoyens de demain. Sensibiliser les jeunes aux enjeux contemporains, leur offrir
    des outils adéquats pour penser la ville, leur apprendre à dialoguer et à collaborer, c’est les
    préparer à s’engager dans la vie communautaire et publique pour mieux avoir prise sur leur
    environnement quand ils seront adultes.

Exemples de pratiques participatives inspirantes impliquant des enfants et des adolescents

Application mobile mise en place par la ville d’Oslo pour que les enfants fréquentant l’école primaire puissent documenter leur environnement urbain, notamment les problèmes de sécurité routière.

Photo : Ville d’Oslo

Construction en Lego pour visualiser en D les représentations et les attentes des enfants. Activité réalisée à Londres (Architecture Studio), à Copenhague (Collectivity Project), etc.

Photo : Real Play Coalition

Application mobile mise en place par la ville d’Oslo pour que les enfants fréquentant l’école primaire puissent documenter leur environnement urbain, notamment les problèmes de sécurité routière.

Photo : Ville d’Oslo

Projection dessinée sur un grand support partagé pour l’aménagement de l’aire de jeu L’île aux volcans à Montréal.

Photo : Castor et Pollux

Activité « J’aime, je n’aime pas » sur des éléments de leur quartier avec des enfants de à ans à l’école prématernelle de Dunedin en Nouvelle-Zélande.

Photo : Christina Ergler et Claire Freeman

Participants à l’identification de ressources (services, terrain de jeu, écoles, magasins de musique, etc.) pour la création d’une carte participative destinée aux adolescents de la ville de Boulder, aux États-Unis.

Photo : Ville de Boulder

Autres idées d’activité :

  • Adolescents : plateformes numériques ou jeux vidéo de type Minecraft pour mettre en forme leur vision ou leurs attentes
  • Enfants de 7 à 12 ans : composer un récit prospectif en s’identifiant à un personnage fictif ou à un individu de leur connaissance
  • Jeunes de 8 à 16 ans : filmer ou de prendre des photos d’éléments ciblés dans leur quartier

L’approche inclusive dans un processus de consultation présente quelques limites. Certains groupes sont plus vulnérables, moins disponibles et plus difficiles à atteindre. Par ailleurs, pour être efficaces, les outils déployés au cours de la consultation ne peuvent être standardisés et devront être constamment adaptés aux besoins de chaque public. Enfin, si l’intérêt d’inclure les familles dans un processus participatif est évident, maintenir leur implication demeure toutefois un grand défi.

Depuis mars 2020, le contexte de pandémie mondiale et les règles sanitaires qui en découlent nous ont obligés à revoir un bon nombre de nos pratiques collectives. Les processus se déploient maintenant en proposant de plus en plus d’activités virtuelles. Si cette nouveauté imposée a demandé bien des adaptations et présente des contraintes importantes puisque tout le monde n’a pas accès aux outils technologiques ni la même aisance à les utiliser, elle offre aussi des avantages :

  • Un public potentiellement plus large. Il est pour certaines familles plus facile de participer à un atelier de consultation depuis son salon sans devoir effectuer de déplacements. Les deux parents peuvent être présents en même temps et les enfants peuvent même se joindre à la discussion puisque l’exercice a lieu dans la maison.
  • Une variété d’outils disponibles. En plus des formats traditionnels (plénière, exercices en sous-groupe, rédaction de Post-it virtuels, etc.), la communication virtuelle permet de déployer une vaste panoplie d’outils grâce au support d’un écran qui peut intégrer des sondages, la réalisation d’une carte collective, la mise en place d’un jeu, etc.
  • Une économie logistique potentielle. Les gains de temps (déplacements, préparation de la salle, etc.) et d’argent (location, collations, etc.) permettent de mettre l’accent sur le bon déroulement de la démarche, par exemple en renforçant l’étape de mobilisation pour toucher un plus vaste public.
  • Le renforcement des liens intergénérationnels. Le format virtuel, en permettant de partager des savoirs pratiques, peut renverser les rapports de pouvoir habituels. Ainsi peut s’instaurer une nouvelle collaboration entre les plus jeunes, familiers avec les outils technologiques, et leurs aînés qui vont faire appel à leur expertise.
  • Une prise de parole plus libre et égalitaire. Une séance de consultation en personne peut être intimidante pour certains individus plus timides ou vulnérables, mais en virtuel, les possibilités sont multiples pour partager une idée, quelle que soit son aisance à prendre la parole; on peut éteindre sa caméra, rester anonyme ou simplement écrire son idée en cours de clavardage.

Faciliter l’implication des enfants

Quelques bonnes pratiques encouragent la participation des plus jeunes à des ateliers en ligne :

  • Adapter les horaires et le format au jeune public : séance courte, atelier en journée, jumelage avec un adulte, activité ludique, etc.
  • Cibler des éléments précis pour une session : aménagement d’une aire de jeu, intégration de l’eau dans le parc, etc.
  • S’appuyer sur les réseaux scolaire et communautaire : temps de consultation en classe, activités soutenues par une association locale, etc.

Favoriser les pratiques participatives en personne

Il demeure toutefois important de privilégier les activités en personne, dans les respects des règles sanitaires. On peut ainsi organiser des ateliers à l’extérieur, par exemple dans le lieu visé par le réaménagement. Les participants seront rassemblés en très petits groupes, voire en bulles familiales hermétiques. On peut installer un kiosque de consultation dans un quartier résidentiel ou près d’une école, organiser une marche exploratoire, construire en groupe du mobilier urbain léger ou aménager un potager collectif; ce sont là des activités de plein air particulièrement bien adaptées aux familles.

On peut concevoir des formats hybrides. Un atelier en ligne en amont posera les enjeux et sera suivi d’un exercice sur le terrain. Par exemple, chaque bulle familiale sera invitée à rassembler des images de son quartier ou à consigner des informations sur l’environnement bâti sur une carte préalablement fourni grâce à une marche exploratoire menée en famille. Les restitutions collectives pourront ensuite être effectuées en ligne.

Le répertoire ludique, l’invitation à une activité physique, la collaboration entre les différents membres de la famille sont des moyens pertinents pour développer des activités de terrain. Ce format hybride exige une préparation minutieuse et bien articulée, mais il est très attractif pour les familles en raison de sa flexibilité, de la variété des outils déployés et du contexte sécuritaire dans lequel il se déploie.

  • Bâtir ensemble la ville – Urbanistes en herbe
  • Cities Alive: Designing for Urban Childhoods, ARUP
  • Planning with Preschoolers: City Mapping as a Planning Tool, Freeman, C., Ergler, C. & T Guiney
  • “What Makes a Good City in Pre-Schoolers’ Eyes? Findings From Participatory Planning Projects”, Australia and New Zealand Journal of Urban Design
  • Placemaking with Children and Youth : Participatory Practices for Planning Sustainable Communities, Victoria Derr, Louise Chawla and Mara Mintzer

Contenu produit avec la collaboration de

Juin 2021