En relation avec le paramètre précédent, l’adhérence permet le transfert à la glace des propriétés reliées à la capacité portante du support sous-jacent. Le terme « support » prend ici tout son sens de lien stable et solide avec la glace.

Les supports n’ont cependant pas tous les qualités intrinsèques qui rendent la glace invulnérable à toute rupture. La nature de la surface d’un support détermine résolument la force de liaison de la glace à celui-ci. Ainsi toute surface présentant un certain degré d’hydrophobie, donc qui « repousse » l’eau à l’état liquide, ne transmettra que partiellement ses propriétés relatives à sa solidité.

Un exemple concret réside dans les matières dérivées du pétrole. Si la patinoire est installée sur une toile de polyéthylène ou sur un revêtement d’enrobé bitumineux fraîchement posé, la charge admissible empêchant la rupture de la glace est réduite considérablement. Le poids d’une personne affecte peu la solidité d’une telle glace, mais toute intervention effectuée au moyen d’un équipement mécanisé mobile risque fort de tout faire éclater au premier passage. Dans ces conditions, il est suggéré de se référer aux différentes chartes de charges admissibles appliquées aux patinoires sur plans d’eau; voir particulièrement Travaux sur les champs de glace, de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (1996).

À l’inverse, tout support présentant une surface permettant à la glace de s’y ancrer lui transférera ses propriétés intrinsèques de résistance aux forces qu’on pourrait y appliquer.

L’épaisseur d’une couche de glace sur un plan d’eau doit atteindre au moins 25 cm pour pouvoir supporter une voiture de tourisme[1]. À l’inverse, une fine couche de « glace noire » (glace claire) sur la chaussée supporte aisément une telle charge. Ce phénomène tombe aisément sous le sens commun. Comment l’expliquer cependant?

Un premier élément de réponse se trouve dans le principe selon lequel « la résistance en compression de la glace est beaucoup plus grande que sa résistance en traction[2] ». S’y ajoute le fait que la glace sur la chaussée est beaucoup plus ancrée sur son support que la glace sur l’eau. Cet ancrage empêche la glace de s’étirer sous l’effet d’une charge telle une voiture. La force s’applique ici en compression. Elle n’est pas assez considérable pour créer la rupture de la couche de glace.

Au contraire, la couche de glace sur l’eau fléchit telle une membrane sous l’effet d’une charge. Ce fléchissement exerce une force de traction sur la glace. La rupture peut donc se produire même si l’épaisseur de la glace sur l’eau est plusieurs fois supérieure à celle sur la chaussée.

Le principe d’adhérence de la glace à son support est donc un élément essentiel d’explication pour le phénomène mentionné en exemple.

On trouve sur le marché des patinoires prêtes à monter (patinoires en « kit ») destinées aux usages domestiques. Ces équipements contiennent souvent des toiles de polyéthylène pour assurer l’étanchéité. Cette solution est avantageuse pour la période du montage de la patinoire. Il suffit d’arroser copieusement la surface et celle-ci se transformera en glace les premiers gels venus. Ces installations conviennent bien aux opérations manuelles, où seul le poids d’une ou de quelques personnes exerce une pression sur la glace, mais elles sont moins appropriées pour les patinoires publiques, car les dimensions sont beaucoup plus grandes et exigent l’emploi d’appareils mécanisés beaucoup plus lourds.

Dans les cas où un revêtement d’enrobés bitumineux est installé sur la surface du support, deux situations problématiques surviennent :

  • Si l’asphalte neuf présente en surface les composés hydrophobes contenus dans le mélange, la solidité de la glace sera fragilisée considérablement, à moins d’installer sur le revêtement un matériau poreux telle une toile[1] pour pallier cette déficience. La meilleure solution se trouve à moyen terme (deux ou trois ans) quand la surface du revêtement aura subi l’usure du temps et des usagers : la partie dérivée du pétrole se sera alors « volatilisée » et les granulats contenus dans le mélange occuperont la surface très majoritairement.
  • Le deuxième cas est plus problématique. Si la surface est recouverte d’un revêtement acrylique destiné à donner un look résolument sportif à l’ouvrage tout en augmentant son imperméabilité, on peut parler d’un plateau multisports qui n’a de commun avec les caractéristiques d’une patinoire extérieure hivernale que la bande qui l’entoure. Ce cas suscite un questionnement de plus en plus fréquent. Il est préférable d’aménager une patinoire hivernale sur un autre support, car le faire sur un revêtement acrylique pourrait réduire considérablement l’espérance de vie de ce dernier.

[1] Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité au travail. Travaux sur les champs de glace, 1996.
[2] Petrovic. J.J. « Review mechanical properties of ice and snow », Journal of materials science 38 (2003) 1-6.
[3] Ce procédé exige une procédure de travail très soignée.

Version PDF